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Jacques Moulin

vendredi 9 octobre 2009, 19h

Un lieu d’abord : la Normandie maritime et un lien très fort à ce lieu ; un lien retrouvé par l’écriture dans l’éloignement géographique — il s’agit aussi de sortir de sa localité, de
contredire le lieu pour retrouver le lieu fondamental qui me fait l’hôte des autres — et la rencontre inattendue dans la région d’adoption avec la pierre de l’enfance, le calcaire, riche, tendre, poreux, perméable que j’engage dans la matière des mots, dans le déhanchement de la parole érodée. Où l’on retrouve la mer. La mer omniprésente avec sa falaise à silex perce les failles, berce la phrase, emplit la page — « je viens d’un pays où chaque jardin se dépose aux brisants ». J’ai toujours baissé les yeux devant la mer pour mieux en mesurer l’abîme depuis les hautes falaises, pour entrer la mer en soi avec les poissons peut-être, mais plus sûrement les phares qui tiennent haut l’amer, retiennent nos pas, éclairent la nuit de qui tente un passage, de qui cherche à se frayer un chemin de côte vers l’intérieur de soi. Ou bien j’ai cheminé dos à la mer, comme pour rentrer chez moi, retourner au jardin de mer, le retourner comme on retourne à la ligne, attentif au ressassement, à la ritournelle, aux géométries des terres, aux limites du corps.

avec la participation de Françoise Bénéjam et de Michel Beuret de l’atelier de l’Exil


— Tiens ! Vous êtes de Saint-Jouin Bruneval ?
— Saint-Jouin-sur-Mer, quand la Seine était encore Inférieure, dans le crétacé supérieur, à l’étage des valleuses (mes ports de côte jardinée), là-haut sur la falaise crayeuse du Caux.
— Je n’entends rien à vos hauteurs, je demeure aux sables et un peu aux galets.
— Je tiens, moi, à mes couches, toutes mes couches, mes draps du sol, mon estrade à valleuse de l’estran aux pâtures sables verts comme ces poireaux des crêtes de falaise avant les mûrissements gréseux ferrugineux argileux. Poireaux de fin de phrases gardiens de phares oubliés dans les craies silex dressés comme les amers des passes. Je jure, assis face à la mer, que tout ça m’appartient que j’y suis pour de bon que la falaise me tient.


Parmi ses publications : Matière à fraise (éditions de l’Envol, 1996) ; Marron (éditions de l’Envol, 1997) ; Valleuse (Cadex, 1999) ; Arènes 42 (Cadex, 2001), La Mer est une nuit blanche (Empreintes, 2001) ; Escorter la mer (Empreintes, 2005) ; Une échappée de poireaux (éditions Tarabuste, 2006) ; Reconnaissance de la rivière (analogues 2009)
Ainsi que des textes dans les revues de poésie Aujourd’hui poème, À L’Index, L’Atelier contemporain, La Barbacane, Les Cahiers de la Baule, Clapas, Décharges, NU(e), L’Ouvrir, Papilles, Poésie & Art, La Revue des Belles Lettres, Sezim, TIJA, Triages, Verso ...
Il a contribué à de nombreux colloques (autour de Louis Guillaume, Pierre Mathias, Heather Dohollau, Bernard Vargaftig).

entrée libre, réservation indispensable